Le Projet FLOURISH: Rapport Final

Introduction

Le projet FLOURISH (Des approches collaboratrices afin d’appuyer les survivantes de l’excision/mutilation génitale féminine) est financé par l’Agence de la santé publique du Canada et mis en œuvre par le centre de santé communautaire Women’s Health in Women’s Hands. Le projet a été financé pour un montant total de 284 447 $ entre décembre 2017 et mars 2020. Le projet FLOURISH est un projet communautaire collaboratif qui vise à mobiliser, à autonomiser et à soutenir les femmes touchées par la pratique de l’excision/mutilation génitale féminine (E/MGF) au moyen d’ateliers artistiques et d’initiatives de plaidoyer. Le projet vise à développer une initiative intégrée sur l’E/MGF qui mobilise les survivantes de cette pratique, les dirigeants communautaires et les fournisseurs de services dans le but d’améliorer le soutien aux survivantes et d’accroître les possibilités de réduire le risque d’E/MGF en élaborant un cadre à l’intention des fournisseurs de services pour offrir du soutien aux survivantes, de créer un réseau durable de dirigeants et d’organisations communautaires actifs dans la lutte contre les effets de l’E/MGF et travaillant à réduire les risques et à produire des ressources de sensibilisation pour les survivantes ainsi que les principaux médias afin de renforcer la voix des femmes et des collectivités pour dénoncer l’E/MGF.

Contexte

L’E/MGF est une forme de violence fondée sur le sexe contre les femmes et les filles dans plus de 30 pays et on estime qu’elle touche près de 200 millions d’adolescentes. La violence fondée sur le sexe est un phénomène mondial qui a de vastes répercussions physiques, psychologiques, sociales et économiques sur les filles et les femmes. Au début des années 1990, l’E/MGF est devenue un enjeu de premier plan pour les fournisseurs de soins de santé canadiens qui ont commencé à s’occuper de réfugiées et de nouvelles arrivantes provenant de pays où l’E/MGF est une pratique courante. Jusqu’alors, peu de fournisseurs de soins de santé au Canada connaissaient les enjeux relatifs à l’E/MGF et les répercussions sur la santé et les droits des femmes. Une proportion importante de nouvelles arrivantes originaires de pays où l’E/MGF est pratiquée pourrait être touchée, avec des estimations allant de 98 % à 5 % des femmes touchées selon les pays.

Ce projet appuie intentionnellement les femmes ayant vécu une expérience d’E/MGF et reconnaît leur expérience vécue aux croisements du genre, de la race et de la migration, qui sont souvent amplifiés par la pauvreté, le manque d’accès aux services et aux possibilités, ainsi que les obstacles aux soins de santé en raison de leur expérience avec l’E/MGF. Il est essentiel de centrer les communautés sur les inégalités en matière de santé et d’économie qui touchent les survivantes de l’E/MGF et leurs communautés. L’accent mis sur les déterminants sociaux de la santé est essentiel à la production, à la transmission des connaissances et à la programmation du projet.

Principales activités et extrants

Mobilisation des survivantes et renforcement des capacités communautaires

  • Atelier sur le récit numérique : Un atelier de trois jours a été organisé et les participantes ont fait l’expérience d’un processus de narration avec un éducateur artistique et deux membres du personnel du projet FLOURISH. Elles ont écrit et enregistré leurs récits, puis elles ont individuellement construit leurs histoires numériques sur des ordinateurs portables. Le récit numérique est un processus habilitant et accessible qui combine l’écriture, l’enregistrement audio, les images et les vidéos pour créer de courts récits numériques. Ce processus a été utilisé en raison des composantes axées sur les arts et le renforcement des compétences, ainsi que du pouvoir, de l’impact et des possibilités de transformation des histoires pour informer et inspirer des changements sociaux positifs.
  • Discussions en groupe : Trois (3) groupes de discussion ont eu lieu avec 26 survivantes de diverses communautés, notamment de la Somalie, du Nigéria, de l’Éthiopie, de l’Érythrée, de la Gambie, du Soudan et du Sri Lanka.
  • Atelier pour les survivantes et les dirigeants communautaires : Pendant la durée du projet, nous avons offert plusieurs ateliers et discussions communautaires pour discuter de la question, sensibiliser les gens et comprendre les défis auxquels la collectivité et les survivantes sont confrontés.
  • Groupe de soutien aux survivantes : Des groupes de soutien aux survivantes ont été créés pour appuyer des espaces sécuritaires durables pour les femmes ayant une expérience d’E/MGF au-delà de la durée du projet.
  • Campagnes d’information et de sensibilisation (p. ex. Journée internationale de tolérance zéro à l’égard des mutilations génitales féminines, Journée internationale de la femme, etc.): organisation périodique d’événements ouverts au public pour sensibiliser la population. Les présentations comprennent des renseignements contextuels sur la prévalence de l’E/MGF, les répercussions historiques et culturelles et les conséquences à court et à long terme pour les femmes.

Renforcement des capacités des fournisseurs de soins de santé et de services

  • Groupe consultatif : Participation soutenue à un groupe consultatif communautaire composé de femmes ayant une expérience vécue, ainsi que de fournisseurs de services, de chercheurs, de développeurs d’initiatives communautaires, de dirigeants communautaires et de représentants des jeunes.
  • Document d’orientation : Élaboration d’un document d’orientation et d’un mémoire à l’intention des décideurs transdisciplinaires au Canada. Ce document donne un aperçu des enjeux stratégiques et juridiques associés à l’E/MGF en Ontario et au Canada.
  • Mobilisation et renforcement des capacités des fournisseurs de soins de santé (formation et sondages) : Un sondage sur les connaissances, les attitudes et les pratiques a été mis en œuvre auprès des fournisseurs de services afin d’éclairer la conception et la prestation des ateliers des fournisseurs de services.
  • Ateliers pour les fournisseurs de soins de santé : Formation entreprise pour les fournisseurs de soins de santé communautaires, les étudiants de niveau postsecondaire en pratique de sage-femme et en soins infirmiers, les médecins, le personnel infirmier, les travailleurs sociaux, etc.
  • Partenariats (p. ex., Gender Net Plus) : La nature interdisciplinaire du projet FLOURISH donne la possibilité de créer des partenariats importants avec d’autres programmes et organismes, tant au Canada qu’à l’étranger. Nous avons établi des liens avec des centaines d’organismes à divers niveaux au cours des trois dernières années.
  • Médias (trousse d’outils, vidéos de récits numériques et vidéos promotionnelles) : Plusieurs vidéos importantes d’échange de connaissances ont été réalisées en collaboration avec des survivantes et des fournisseurs de services. Tout le contenu médiatique sera intégré dans une trousse d’outils que les organisations pourront utiliser pour renforcer les capacités.

Résultats du projet

  • Différentes activités d’évaluation ont été entreprises, notamment une évaluation des besoins (sondage sur les connaissances, les attitudes et les pratiques auprès de professionnels de la santé), des groupes de discussion pour les survivantes et des sondages postérieurs aux activités pour les deux groupes. Parmi les participants, 92 % ont signalé des changements dans leurs connaissances, 75 % ont déclaré des changements de comportement et 60 % ont déclaré des résultats améliorés en matière de santé. En raison du nombre limité de réponses aux questions du sondage, des groupes de discussion ont été utilisés pour accroître les constatations. Les conclusions des groupes de discussion ont montré que les lois à elles seules ne suffisaient pas à prévenir ou à contrer l’E/MGF à l’échelle mondiale et qu’il fallait accroître l’éducation, la sensibilisation, la défense des intérêts et le soutien pour y arriver. En ce qui concerne les désirs pour le soutien et les mesures d’aide dans le cadre des groupes de guérison, les thèmes communs étaient les conférences et les discussions visant à éduquer les collectivités, la promotion de journées publiques de reconnaissance, l’offre de conférences et la formation des médecins. Bon nombre de ces questions ont ensuite été utilisées pour élaborer et évaluer des activités.
  • En ce qui concerne les professionnels de la santé, 72 % des répondants ont déclaré des changements de connaissances, 84,6 % ont trouvé que les événements ou produits de connaissances étaient utiles et 92,3 % ont déclaré des changements de comportement.

Voici certaines des leçons tirées de l’utilisation d’approches intégrées de promotion de la santé tenant compte des traumatismes et de la violence :

  1. Utiliser et comprendre les données, mais aussi écouter les expériences des gens s’ils s’écartent de ces données;
  2. Obtenir de la rétroaction de façon officielle et informelle;
  3. Éduquer les fournisseurs de services de toutes les disciplines sur les obstacles sociaux et institutionnels;
  4. Application générale des lignes directrices, des principes et des politiques de lutte contre le racisme et l’oppression chez les Noirs qui appuie une approche de promotion de la santé tenant compte des traumatismes;
  5. La sécurité culturelle est contextuelle et doit être comprise au niveau micro, méso et macro. Voici quelques exemples : 
    • parfois, les interprètes culturels et linguistiques sont bénéfiques, parfois non (c.‑à‑d. la confidentialité dans une petite collectivité);
    • l’expression linguistique et les mots peuvent représenter un défi, car les terminologies professionnelles centrées sur le langage typique européen n’existent peut-être pas dans différentes langues;
    • la prise en compte du ton, de la voix et du langage corporel peut se perdre dans la traduction entre les fournisseurs de services et les clients;
    • les fournisseurs doivent officialiser l’élaboration d’approches pour éviter que des possibilités de diagnostic ne soient manquées;
    • il existe des conditions d’injustice qui favorisent les cas d’E/MGF et il faut s’attaquer à ces problèmes macroéconomiques à l’échelle mondiale;
    • il faut reconnaître les contributions des collectivités qui dirigent des interventions depuis des années pour arriver à une collaboration significative;
    • les survivantes sont toutes très différentes et les résultats en matière de santé dépendent de la création d’espaces où l’action, le contrôle, le choix et la voix sont possibles;
    • la stigmatisation associée à l’E/MGF doit être abordée pour tous les résultats et toutes les interventions. 

Prochaines étapes

Le projet a fourni un cadre pour la prestation de services compatissants grâce à la création de documents sur les pratiques exemplaires, les possibilités d’éducation et les ressources accessibles qui sont culturellement et linguistiquement adaptées et pertinentes pour mieux répondre aux besoins des survivantes de l’E/MGF et pour prévenir les nouveaux traumatismes. Les participantes et leurs collectivités bénéficieront de ressources axées sur les survivantes et de la transmission des connaissances, ce qui se traduira par des résultats positifs à long terme pour la santé des personnes particulièrement vulnérables au sein de ces collectivités. L’augmentation des capacités des fournisseurs de services et l’intensification de la formation sur l’E/MGF, les déterminants sociaux de la santé et les obstacles causés par la stigmatisation et la discrimination réduiront ces obstacles et accroîtront l’accès aux soins pour les survivantes et leurs communautés. Le centre de santé communautaire Women’s Health in Women’s Hands est fier d’appuyer des groupes de soutien permanents, de maintenir le réseau des fournisseurs de soins de santé et de diffuser des produits du savoir, notamment la trousse d’outils pour les médias et le volet d’évaluation.